
CGI Talks
CGI Talks
IA : révolution ou simple buzz ?
Bonjour et bienvenue dans IA plus qu’à, le podcast qui tend le micro à celles et ceux qui travaillent avec l’IA au quotidien.
Ce podcast a été créé et soutenu par les équipes CGI. Je suis Emmanuelle Jais, présentatrice de ce podcast et aujourd’hui, je vous propose de partir à la rencontre de Fabrice Valentin VP HO ArtificiaI Intelligence chez Airbus, et Brice Balichard, Vice-Président en charge de l'IA chez CGI, pour comprendre comment Airbus a négocié l’arrivée de l’IA sur son secteur et quelle stratégie est employée actuellement pour faire de l’IA une véritable alliée.
Dans ce premier épisode de IA PLUS QU’À, Fabrice Valentin (Airbus) et Brice Balichard (CGI) explorent les défis, opportunités et impacts de l’intelligence artificielle dans les grandes organisations.
À travers cette discussion franche et inspirante, découvrez comment faire de l’IA un véritable levier de compétitivité et d’innovation, tout en relevant les enjeux d’éthique et de gouvernance.
🎙️Les sujets évoqués dans cet épisode :
- L’IA : buzz ou transformation durable ?
- L’importance de la confiance et de la maturité des organisations face à l’IA.
- Construire une IA responsable : éthique, transparence et impact positif.
- Les cas concrets : l’IA comme game changer pour Airbus et d’autres industries.
À propos de nos invités :
- Fabrice Valentin : Vice-Président Artificial Intelligence chez Airbus. Expert des applications de l’IA dans l’industrie aéronautique.
Dans cet épisode, Fabrice partage son expérience en matière de transformation digitale et d’innovation au sein d’un grand groupe industriel. - Brice Balichard : Vice-Président, expert IA chez CGI.
Dans cet épisode, Brice apporte sa vision stratégique sur les enjeux de déploiement, d’éthique et de rentabilité liés à l’intelligence artificielle dans les grandes organisations.
Un podcast présenté par Emmanuelle JAÏS, responsable marketing chez CGI.
Bonjour et bienvenue dans Y'a plus qu'à, le podcast qui donne la parole à celles et ceux qui travaillent tous les jours avec l'IA au sein de grandes organisations. Je me présente, je suis Emmanuelle Jaïs, responsable marketing chez CGI, en charge notamment de l'offre IA et j'ai le plaisir de présenter ce podcast. On se retrouve aujourd'hui pour comprendre comment Airbus a négocié l'arrivée de l'intelligence artificielle et quelle stratégie l'entreprise déploie pour en faire une alliée au service de la performance et du business. Je vous propose d'échanger avec Fabrice Valentin, vice-président Artificial Intelligence chez Airbus et Brice Balichard, vice-président en charge de l'IA chez CGI. Bonjour Fabrice, bonjour Brice. Je suis ravie de vous recevoir aujourd'hui pour ce premier podcast « Y'a plus qu'à ». Alors, avant de commencer notre échange, j'aimerais avoir votre sentiment à tous les deux. Depuis deux ans, l'IA est le mot à la mode dans les médias. Selon vous, est-ce une tendance sur le long terme qui va véritablement révolutionner nos vies de professionnels et de citoyens ou est-ce que le soufflé risque de retomber ?
Fabrice Valentin:C'est une bonne question, c'est une bonne question. J'ai envie de dire que ça va rester pour une raison simple, c'est que quand on regarde de la lorgnette d'un constructeur d'avions comme Airbus, ça fait quand même plus de 10, 15, voire 20 ans qu'on travaille sur le sujet dans notre domaine. Alors certes, il est extrêmement à la mode et l'IA fait le buzz depuis deux ans. Je pense personnellement un petit peu trop. Je pense qu'on a tendance aussi dans notre monde moderne à exagérer les tendances, à exagérer les buzz. Donc très certainement, le momentum qu'on a aujourd'hui risque de ralentir un petit peu. Mais ce que l'IA amène est fondamentalement différent sur notre façon d'appréhender le monde du travail. Et je pense qu'on ne s'en rend pas encore complètement compte à tout niveau, et que d'ici 10-15 ans, quand on regardera 2020-2021, 2022-2023-2024, ces 4-5 dernières années, l'explosion de l'IA générative, on se dira, oui, ça a été un changement, un paradigm shift, comme on dit en anglais, un véritable changement structurel dans notre façon de travailler.
Emmanuelle Jaïs:D'accord. Et vous, Brice, du coup, est-ce que l'IA, c'est aussi une tendance qui retombera comme un soufflet ou pas ?
Brice Balichard:Alors, je vais essayer de ne pas paraphraser Fabrice, je suis bien évidemment d'accord avec ce que Fabrice a dit. Pour moi, ça paraît peu probable que ça retombe comme un soufflé, même s'il y a un certain nombre d'incertitudes sur les coûts que représente l'IA, les structures de coûts qui sont sous-jacentes, même si on parle d'efficacité aussi aujourd'hui, dont on n'est pas toujours sûr, et donc qui génère l'incertitude. Mais bon, il y a l'incertitude comme toute nouvelle technologie, j'ai envie de dire, et c'est quand même difficile de répondre à cette question parce qu'on voit qu'il y a une accélération des technologies, bien malin qui peut dire quelle technologie disruptive va sortir demain, dans le cadre de l'IA, je veux dire ? Et qui sera capable de prévoir les effets que ça aura ? On n'est pas à l'abri d'avoir une IA demain qui sort et qui soit un peu plus frugale, donc plus en adéquation avec les enjeux environnementaux et qui soit aussi plus viable économiquement, ce qui permettra d'accélérer encore l'usage de l'IA.
Fabrice Valentin:D'ailleurs, tu me fais penser, je te coupe, mais tu vois, sur les limites qui pourraient être les raisons pourquoi l'IA retombe comme un soufflet ou que le buzz s'éteigne, c'est la contrainte énergétique, je pense que c'est celle que tu évoques. L'autre point que je mets face à ça, c'est les quantités d'investissement gigantesques de beaucoup d'entreprises dans le domaine. Donc, a priori, c'est sûr qu'il y a des contraintes, mais tout le monde se donne les moyens d'essayer d'y répondre.
Brice Balichard:Mais c'est vrai que du coup, ça génère un marché qui est assez flou. Clairement, on se dit, tiens, qu'est-ce qui va nous arriver demain ? Je pense que si on regarde ce qui nous arrive les dernières années, c'est quand même déjà assez fou. Donc, le marché à venir reste du coup assez flou.
Emmanuelle Jaïs:Justement, on comprend bien que le marché est en pleine expansion. Est-ce que vous pouvez m'en dire un peu plus sur votre perception du marché ?
Brice Balichard:Oui, bien sûr. D'abord, on parle de quel marché ? On parle de du marché de la production de l'intelligence artificielle. D'abord, l'IA, ça existe depuis 70 ans. Si on fait un petit raccourci, on va dire dans les années 50. Depuis 70 ans, c'est un marché qui a été extrêmement instable. Une technologie, un environnement, un écosystème, on peut employer plein de mots autour de ça, qui a été extrêmement instable. D'ailleurs, au siècle dernier, il y a eu deux hivers de l'IA, donc les winter et high, comme on dit, où il ne s'est absolument rien passé. Et pourquoi il y a ce flou sur ce marché, donc les perspectives autour de l'IA ? Il y a plusieurs facteurs. La croissance de l'IA va dépendre de plusieurs facteurs. Il y a un facteur technologique, bien évidemment, On l'a vu avec les notions d'infrastructure. On a très bien vu Nvidia qui a sorti ses GPU au bon moment, au bon endroit, qui a explosé, qui a pris une partie du marché. Sans ses GPU, on ne ferait pas aujourd'hui l'IA générative comme on en fait. Donc, il y a un facteur technologique infrastructure. Il y a un facteur technologique lié au logiciel également. On voit que les hyperscalers, Microsoft, Google, Amazon accélèrent très fort sur l'IA et veulent mettre à disposition de leurs clients publics, professionnels et particuliers plus exactement, des services autour de l'IA. Donc, ce sont des facteurs d'accélération du marché. Il y a aussi des facteurs humains, bien évidemment. Ce marché dépend des facteurs humains. On parle de compétences. Est-ce qu'on a les bonnes compétences pour développer les produits d'IA de demain ? C'est un premier point. Mais il y a aussi, ce qui me paraît le plus important, et ce dont "je souffre" le plus depuis ces dernières années, c'est le niveau de confiance qu'ont nos clients sur ce que peut faire l'IA. Il faut bien se rendre compte que l'IA, il y a plein d'exemples, on en connaît tous. Il y a la météo, qui est un très bon exemple de modèle extrêmement complexe et qui se fiabilise au fur et à mesure des années, mais en qui... les gens n'ont pas tout le temps confiance. Donc, en fait, ce niveau de confiance en l'IA a un impact sur le marché de l'IA. Ça, c'est clair. C'est-à-dire que si les gens n'ont pas confiance en un produit, ils ne vont pas l'acheter. C'est certain. Ce qui s'est passé avec l'IA générative il y a maintenant quelques années, notamment Tchad GPT, avec l'LLM, l'extension des LLM, c'est que les gens se sont dit « Waouh ! » Aussi bien à titre particulier, professionnel, « Waouh ! Chat GPT, ça fonctionne. » Ou « Ça semble très bien fonctionner. » Et en plus, il y a un effet « Waouh ! » Ça, ça a redonné la confiance qui a recréé un boost sur le marché parce qu'il répondait aussi, évidemment, à des enjeux de de nos clients. Le dernier élément qui me semble extrêmement important pour savoir comment le marché va se porter demain, c'est le niveau de maturité de nos clients. On ne peut pas avoir d'IA s'il n'y a pas une gouvernance de données qui a été mise en place, s'il n'y a pas une qualité de données qui est éprouvée, s'il n'y a pas des plateformes accessibles et déployables, s'il n'y a pas des équipes en place, etc. Donc tout ça fait que le marché d'IA de demain, il est dépendant de plusieurs facteurs et je dirais que la maturité de nos clients globalement est un des facteurs clés.
Emmanuelle Jaïs:Merci Brice, j'ai entendu dans ce que vous disiez qu' Airbus avait quand même un certain un niveau de maturité. J'ai envie de donner la parole à Fabrice. Vous, en tant qu'industriel, quelle est votre vision de cette dynamique sur les sujets de l'IA et le niveau de maturité de votre entreprise qui est Airbus ?
Fabrice Valentin:Alors, Brice vient d'évoquer un des points absolument essentiels, c'est le niveau de confiance. Et si on regarde Airbus en tant que constructeur aéronautique, en tant que producteur, Airbus commercial, producteur d'avions, forcément, on évolue dans un monde où on aime la certitude. On aime à dire qu'on ne tolère Il n'y a pas des erreurs au-delà de 10 puissance moins 9 en termes d'erreur. C'est-à-dire une très grande précision dans tout ce qu'on va faire, des aspects du design, engineering jusqu'à la production et le support de nos avions. Et l'IA, en opposition, on est dans un monde probabiliste. On est dans un monde où on accepte, quand on utilise l'IA, on accepte d'avoir un niveau de confiance qui est à 80%, 90%. Donc, on est très loin du 10 puissance moins 9. Donc, c'est sûr que de prime abord, l'IA, ça ne paraît pas comme la technologie évidente pour un groupe comme Airbus. Et c'est vrai que, historiquement, on a eu des projets extrêmement ciblés, extrêmement niche, parce qu'on a ciblé justement les endroits où l'IA pouvait s'appliquer, où ça pouvait être pertinent d'apporter des solutions d'automatisation avec ce niveau de certitude, ou ce mauvais niveau de certitude, si je puis dire. Et aujourd'hui, avec l'explosion notamment de l'IA générative, mais aussi ce qui entraîne, je dirais, un nouveau regain vers l'IA, vers les autres formes d'IA, on se rend compte qu'on a atteint une maturité dans le groupe où il y a quand même beaucoup d'endroits où on peut se permettre de repenser nos processus pour arriver à automatiser une partie des activités et bénéficier du gain de cette automatisation et arriver à avoir de la valeur tangible, réelle, réaliste et qui ne soit pas à mettre en danger les niveaux de safety dont je parlais il y a cinq minutes. La maturité du groupe a évolué doucement. On a fait beaucoup d'efforts sur la donnée depuis de nombreuses années et on commence à arriver à les cueillir grâce aux nouvelles capabilités d'IA qui apparaissent depuis ces derniers temps. Ensuite, reste à mettre tout ça en équation. On est loin d'être un groupe digital native où déployer une nouvelle technologie se fait en deux clics. C'est quand même beaucoup d'efforts de construire des environnements sécurisés, des environnements suffisamment responsables aussi en termes de compliance. Et je pense que 2024, ça a été un petit peu notre plus gros succès. C'est ce qu'on a réussi à amener dans l'entreprise, amener le cadre, amener les premiers éléments de plateforme, de structure, de gouvernance pour pouvoir déployer de l'IA. Clairement, c'est ce qu'il faut qu'on arrive à accélérer dans ces prochains mois pour que notre entreprise ait une maturité digne du niveau de ce qu'on peut attendre d'un grand industriel comme Airbus.
Emmanuelle Jaïs:Fabrice, quand on parle de projets, que ce soit des projets informatiques, des projets qui touchent des sujets comme l'IA, on sait très bien que rien n'est parfait. Si vous aviez une baguette magique et que vous pouviez revenir en arrière, vous changeriez quoi ?
Fabrice Valentin:Je pense que la plus grande leçon... qu'on aura eu historiquement c'est en trois étapes le premier point c'est clairement on a eu tendance à extrêmement négliger les efforts d'adoption parce qu'on a toujours l'impression que parce qu'on a des algorithmes qui marchent très très bien et qui permettent d'apporter des réponses extrêmement rapidement de façon beaucoup plus robuste que des êtres humains naturellement les êtres humains vont accepter et adopter ces algorithmes et travailler avec c'est clairement faux donc il faut avoir tout être suffisamment humble et en même temps est suffisamment persistant pour faire les efforts nécessaires pour que les utilisateurs adoptent la technologie donc il faut absolument prioriser l'utilisateur dans la réflexion avant de déployer tout système IA, avant même de commencer à imaginer quelle va être la forme d'algorithme qu'on va utiliser il faut vraiment se concentrer sur ce que les utilisateurs vont faire, comment ils vont le consommer donc ça c'est vraiment le premier gros point il y en a deux autres, le second c'est la donnée mais je passe vite parce qu'on le répète tellement souvent il ne faut absolument pas sous-estimer le travail de fond indispensable pour amener la donner un niveau de qualité qui permet de faire fonctionner de l'IA. Et le troisième point, je pense que c'est un petit peu lié à l'adoption aussi, il faut arriver à faire sortir l'IA du domaine du digital, du domaine de la data science, de l'IT, de la transfo data ou quel que soit l'endroit où on le met, il faut réussir à amener l'IA comme un moyen d'exécuter les métiers, un moyen d'améliorer les métiers. C'est une problématique métier, c'est une problématique de transformation métier, c'est pas uniquement une problématique digitale. Et c'est c'est parfois difficile de faire le pont et en amenant des projets IA avec un focus un petit peu trop fort sur l'angle digital, on oublie vite le métier, on oublie vite le challenge ensuite de la transformation des métiers pour vraiment pouvoir en bénéficier.
Brice Balichard:Je me permets de rebondir sur ce que vient de dire Fabrice, qu'il y a un enjeu de communication et d'acculturation qui est extrêmement important, qui est évident pour les générations après nous. C'est moins le cas des gens à qui on travaille dans le monde de l'industrie, chez Airbus, mais aussi chez CGI, très clairement, et on a tendance à un petit peu le négliger, je pense, et je pense que je peux même prendre l'exemple interne de CGI, pour le déploiement de l'intelligence artificielle. On rame un petit peu, évidemment. Tout le monde ne perçoit pas forcément les efforts, la valeur que ça représente, mais on va y arriver. En tout cas, beaucoup d'acculturation est nécessaire, ça c'est certain. Moi, si je devais revenir en arrière dans la manière dont on a construit l'offre autour de l'intelligence artificielle, la manière dont on présente et on vend nos produits et nos services d'offre d'intelligence artificielle, je pense qu'on a raté une petite marche qui est nécessaire, je pense, c'est créer des liens plus étroits avec l'écosystème de l'intelligence artificielle. Je pense notamment à celui des startups. On est à Toulouse, aujourd'hui, Et Toulouse, c'est un bassin économique et technologique extrêmement vivant, extrêmement vivace, extrêmement dynamique. Il y a énormément de startups qui se sont créées les dernières années autour de l'IA. Et je pense qu'une société comme nous doit être en relation très étroite avec cet écosystème. Et je rajouterais un autre écosystème que je trouve extrêmement intéressant, c'est celui des institutions françaises. Il y a notamment à Toulouse un organisme qui s'appelle Anity, auquel contribue d'ailleurs Airbus et d'autres industriels, auquel contribue également CGI. Donc on se retrouve avec des universitaires, des chercheurs, des concurrents, et on discute d'intelligence artificielle et je trouve ça réellement passionnant alors il y a beaucoup de recherche fondamentale mais il y a aussi la recherche fondamentale réellement appliquée à des cas pratiques et donc c'est là qu'on fait le bridge et on voit que c'est une technologie moderne c'est là qu'on fait le pont entre la recherche fondamentale et l'application de cette recherche là c'est peut-être pas demain matin mais c'est certainement après demain qu'on verra cette recherche s'appliquer et l'autre point quand même que je voulais dire c'est si je pouvais revenir en arrière certainement j'irais acheter des actions Nvidia voilà !
Emmanuelle Jaïs:Brice, une question pour vous. J'aimerais comprendre en quoi l'IA peut être un game changer pour certaines entreprises ?
Brice Balichard:Ce qui est certain, vu de chez moi, c'est que l'IA, c'est devenu ou ça va devenir, selon les entreprises, un facteur de compétitivité. À quoi sert l'IA ? Ça sert à produire plus vite et ou à produire mieux, donc mieux en meilleure qualité, et ou à produire moins cher. Les trois axes étant plus ou moins corrélés. En tout cas, c'est la promesse de l'IA et c'est ce qui intéresse tous nos clients. C'est un facteur de compétitivité, c'est-à-dire être plus performant, aller plus vite que ses concurrents. Ça peut être un game changer dans le sens où, effectivement, ça peut permettre de créer une offre différente, un système différent un modèle business différent, un modèle de fonctionnement différent. Je reviens toujours quand je discute de ça, en quoi l'IA est un game changer, en quoi ça a un impact. Je prends toujours l'exemple de Zalando. Zalando, c'est une plateforme de e-commerce que beaucoup de gens connaissent, je pense. Je crois que c'est le leader européen sur son secteur d'activité, dans son domaine. Zalando, en fait, qu'est-ce qu'ils ont fait ? Ils n'ont pas créé une entreprise en disant on va vendre des produits, on va vendre des chaussures. Ils ont dit on va promettre nos clients qu'ils seront livrés en moins de 24 heures et que si la perte de chaussures ne leur convient pas, le lendemain matin, ils l'auront dans leur boîte aux lettres, la nouvelle perte de chaussures. Donc la promesse, c'était une Et leur modèle business a été fondé sur cette promesse. S'ils ont été capables de faire cette promesse et de la tenir, bien évidemment, c'est parce qu'ils avaient une gouvernance de données très forte. Ils avaient des données en qualité. Ils ont mis la donnée au centre de l'entreprise. Donc, c'est une entreprise data-driven. Et au-dessus de cette couche data-driven, ils ont mis de l'intelligence artificielle qui leur a permis de prédire les ruptures de stock, de prédire les livraisons, les délais de livraison, les réapprovisionnements. Donc, tout ça est un bon exemple qu'une entreprise peut créer un modèle en se basant sur les données et en se basant sur les données. sur l'intelligence artificielle. Et dans ce cas-là, effectivement, on peut considérer que c'est un game changer.
Emmanuelle Jaïs:Du coup, Fabrice, on parle de game changer, qu'en est-il chez Airbus ?
Fabrice Valentin:Je suis vraiment d'accord avec la conclusion de Brice, c'est que finalement, ça peut devenir un game changer quand on arrive à intégrer la technologie au cœur des métiers d'une entreprise. Donc une entreprise, l'exemple donné de Zalando est très bon, je ne le connais pas aussi bien que Brice, mais c'est vrai qu'une entreprise qui est data-centric, data-driven depuis sa création, elle peut amener l'IA et le gain de de compétitivité juste gigantesque. Elle peut amener l'IA de façon complètement naturelle dans ces processus. C'est loin d'être le cas dans une entreprise dont le métier est d'assembler mille grosses machines qui volent par an. C'est sûr qu'on n'est pas né dans un monde d'état driven. On n'a pas non plus certainement fait l'ensemble des efforts nécessaires pour y être. Mais ce dont on se rend compte, c'est qu'on le devient progressivement et on est bon quand même pour faire des efforts continus chez Airbus. Donc on on aligne depuis des années les efforts nécessaires pour arriver à petit à petit faire cette continuité digitale, faire cette continuité qu'on appelle de bout en bout pour amener à ce que nos process soient complètement digitalisés et donc puissent être accélérés par l'IA. Et à ce moment-là, ça devient un game changer. Donc pour être honnête, ce n'est pas un game changer à l'échelle de l'entreprise aujourd'hui parce qu'on est loin d'avoir cette continuité sur l'ensemble de nos processus. Par contre, ça peut être un game changer à l'endroit où on arrive à l'appliquer, à l'endroit où cette continuité ou cette continuité connectivité existe. Donc, on a des cas précis, très charismatiques pour nous, très symboliques de projets où on a réussi à avoir une bonne application de l'intelligence artificielle parce que la donnée était là ou a été connectée et la continuité a été offerte. Après, si je prends un autre exemple, peut-être plus proche d'entreprises d'ailleurs comme CGI ou autres, on voit ce qui se passe depuis quelques mois, années sur l'IA générative dans les métiers de software engineering et on voit que ça devient un game changer où c'est même extrêmement mesurable. Beaucoup d'entreprises commencent même à afficher des ambitions auprès de leurs investisseurs de gains d'efficacité, de productivité basés uniquement sur l'emploi de l'IA générative dans les métiers du développement du software. Donc ça devient très concret, très réel dans les métiers du digital. Pas étonnant, parce que ces modèles sont quand même excellents dans leur propre domaine. Ils ont appris quand même énormément de données qui sont autour de tout ce qui est codage. C'est peut-être évident que ce soit là qu'on l'applique. Ensuite, dans les métiers d'ingénierie plus complexes, on plus complexe, plus varié, plus multifacette, multimétier, tel que ce qu'on voit chez Airbus. Je pense qu'il faudra encore du temps pour qu'on arrive à avoir des IA qui fonctionnent bien sur l'ensemble des étapes avant de pouvoir afficher ce même genre de gain à nos investisseurs. Game changer, pas encore, mais on y travaille. Voilà, la réponse courte.
Brice Balichard:Je vais me permettre de rebondir sur ce que disait Fabrice. Fabrice, tu as employé le mot rentabilité, c'est effectivement un mot-clé. Aujourd'hui, il n'y a pas d'investissement dans l'intelligence artificielle sans business case. Autrement dit, il n'y a pas d'investissement investissement sans avoir une perspective de retour sur cet investissement, ça devient un des enjeux de l'intelligence artificielle. Je veux juste prendre un exemple, c'est celui d'OpenAI avec ChatGPT. C'est quand même une solution qui a été mise en place et qui aujourd'hui a 200 millions d'utilisateurs, qui repose sur des investissements colossaux, aussi bien passés qu'à venir. D'ailleurs, ils se posent la question de leur modèle économique, même si ça peut paraître un peu fou, ils se posent la question de leur modèle économique en introduisant de la publicité pour rentabiliser le modèle. Donc c'est un bon exemple qui montre que l'IA, effectivement, c'est un facteur d'investissement mais qu'à un moment ou à un autre la structure de coût nous rattrape et que la structure de coût devient un sujet de discussion avec nos clients systématiquement c'est-à-dire ok on déploie un algorithme mais dans combien de temps il est rentable quel est le coût à long terme c'est du CAPEX et de l'OPEX etc.
Emmanuelle Jaïs:Je vous propose à présent de réfléchir à la responsabilité des entreprises sur le sujet de l'IA. La montée en maturité du marché suppose que les organisations soient en mesure d'embarquer un service d'IA responsable. Mais nombreuses sont les actions à mener. Alors, une question que l'on peut se poser dès à présent, c'est par où commencer ?
Brice Balichard:Si je suis un peu scolaire, je dirais qu'IA responsable, ça se réfère à la conception, au développement et à l'usage de l'intelligence artificielle au sens large du terme. Et tout de manière éthique, sécurisée et je dirais alignée sur des valeurs humaines, même si les valeurs humaines sont forcément subjectives. Concrètement, il y a quelques mots-clés. Il y a une notion, une IA, elle est responsable si elle est transparente. C'est-à-dire qu'elle peut vous expliquer pourquoi elle vous fait cette recommandation, pourquoi elle vous fait cette prédiction, pourquoi elle sort ce résultat. Donc il y a une notion d'explicabilité et de transparence. Il y a une notion de protection des données et de vie privée. Donc ça, ce n'est pas lié à l'IA, c'est lié à la data, bien évidemment. C'est-à-dire qu'on n'a pas le droit d'utiliser des données personnelles ou en tout cas, on n'a pas le droit de les exposer. Il y a une notion d'équité et de biais. On a envie de dire, oui, des IA peuvent générer des biais. Alors, ce sont souvent des biais liés au genre, à la race, à la religion, ce genre de choses. Donc, on doit être dans l'équité sur ces sujets-là et on doit extrêmement limiter les biais possibles d'une IA. Et il y a aussi un point qui est l'impact social. Sans rentrer dans le monde des bisounours, l'impact social et environnemental, ce serait quand même bien qu'on produise des IA qui soient positives pour le monde. Et ça rentre dans ces démarches d'IA responsables.
Emmanuelle Jaïs:Fabrice, moi, je me dis, mais comment trouver le bon équilibre entre l'IA responsable et la valeur qui est générée par l'IA en fait ?
Fabrice Valentin:Oui, c'est une bonne question et je pense que chez Airbus, on a eu la chance d'avoir des talents, des experts qui se sont penchés sur la question depuis de nombreuses années. Alors, je mets directement les pieds dans le plat. Le fait qu'on soit un grand groupe d'aérospace et de défense fait qu'on s'est posé très tôt des questions sur l'éthique de l'IA et de l'emploi de l'IA dans le cadre des différents produits qu'on met sur le marché. Donc, il y a un grand programme qui s'appelle FKAS, un système qui va arrivé dans de nombreuses années, mais qui est un des grands projets auxquels contribue Airbus Defence & Space, où des chercheurs, des industriels ont réfléchi depuis un petit paquet de temps à la question de l'IA éthique. Ce que nous, on a fait, de ce qu'on a amené en 2024, et ce que les équipes, le collectif de l'IA chez Airbus, aussi bien dans le digital que dans les métiers, ont réussi à amener, c'est assurer un travail de fond pour rassembler les valeurs de l'IA qui nous semblent pérennes pour Airbus et qui nous semblent devoir définir pour répondre à ce que disait Brice. Sur la première de toutes les étapes, c'est finalement quelles sont les valeurs de l'IA pour le groupe Airbus. On les a faites, écrites par des groupes de travail qui ont travaillé depuis de nombreuses années. On a rassemblé l'ensemble des activités là-dessus. On a tout réussi à synthétiser en six grandes valeurs. Ensuite, on a présenté ça à notre top management qui a bien sûr tout à fait supporté l'initiative et on essaye de sortir une un charter de l'IA, arriver à avoir une définition en quelques pages de ce qu'est pour nous l'IA éthique et responsable. Et bien sûr, ce n'est pas uniquement être en conformité avec les régulations qui vont arriver. On parle beaucoup de l'EUA Act, mais il y en a beaucoup d'autres sur Terre qui vont être publiées. C'est ça, mais au-delà de ça, c'est surtout s'assurer qu'on ait les bonnes méthodes, mécanismes, systèmes de gouvernance dans le groupe pour déployer l'IA de façon responsable. Un des angles qui me paraît essentiel et qui est un des plus délicats, c'est ce qu'on appelle le responsable par design, le déploiement de l'IA de façon éthique par design. Je ne sais pas trop bien le traduire en français, mais l'ethical AI by design, finalement, c'est couvrir les aspects de comment penser l'utilisation d'un système d'IA et son impact sur les utilisateurs avant même de le designer. Et c'est vraiment essentiel parce qu'on se rend compte que si c'est bien fait, ça permet de faire Donc, pour complètement répondre à la question, si on fait bien et qu'on construit bien les méthodes pour déployer l'IA de façon responsable et de façon éthique, on va favoriser l'adoption. Donc, on va favoriser la génération de valeur. Pour générer de la valeur, il faut bien que des utilisateurs emploient de l'IA.
Emmanuelle Jaïs:Brice, Fabrice, merci pour vos éclairages. C'était passionnant. Avant de nous quitter, je vais vous inviter à adresser un dernier message à nos auditeurs. Fabrice, est-ce que vous auriez un conseil relatif à l'IA pour les personnes qui nous suivent ?
Fabrice Valentin:Ah oui, j'ai un conseil que je donne tout le temps, quelle que soit l'audience. C'est finalement, ne faites pas qu'écouter ce qu'on en dit à la radio ou à la télé ou autre, ou sur les réseaux sociaux, mais mettez les mains dedans. Essayez vraiment de toucher l'IA, l'expérimenter et comprendre ce que ça peut faire, comment ça peut transformer votre propre métier, voire votre vie. On ne va peut-être pas être trop ambitieux, mais parce que je pense qu'il vaut mieux avoir les rênes et être acteur de ce changement que de le subir ou alors de devoir de façon contrainte... s'y adapter. Et c'est le bon moment de démarrer si ce n'est pas déjà fait.
Emmanuelle Jaïs:Merci beaucoup Fabrice. Et au-delà d'un conseil, Brice, auriez-vous un vœu pour conclure ?
Brice Balichard:J'aimerais bien que l'intelligence artificielle soit demain au service de l'homme, qu'elle engendre une amélioration de nos sociétés et qu'elle ne soit pas uniquement au service d'intérêts privés. Je pense que c'est vraiment le sens de l'histoire. L'IA va impacter nos sociétés, c'est sûr. J'aimerais bien que notre État soit aussi en capacité de prendre ses tirs à bord le corps et qu'elle soit au service citoyens et qu'on en bénéficie tous. Ce serait un vœu. Peut-être un vœu pieux, mais un vœu quand même.
Emmanuelle Jaïs:Merci à vous. Merci à toutes et à tous d'avoir suivi cet épisode de Y'a plus qu'à. Pour plus d'informations sur l'IA chez CGI et Airbus, rendez-vous dans le descriptif de cet épisode. Abonnez-vous au podcast pour ne rien louper des prochains épisodes. Et quant à moi, je vous dis à très vite pour parler IA.
Unknown:Ce podcast a été créé et soutenu par les équipes de CGI, et il est réalisé par l'agence Calliopé.