
Green Door Study Advice
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Episode 8: Le Paradoxe de l'Abondance de Choix, suivi d'une interview avec David et Anne-Sophie
Bonjour à tous et bienvenue chez GreenDoor Podcasts et notre série sur l’orientation. Aujourd’hui, je vais vous parler du paradoxe de l’abondance de choix et la difficulté qu’ont beaucoup de jeunes à faire le bon choix d’études supérieures. Je vais vous l’expliquer grâce à quelques exemples suivi d’une interview avec David, étudiant de psychologie aux Pays Bas et Anne-Sophie, photographe- entrepreneur qui a fait des études de psychologie à l’UCLouvain. Ils vont vous raconter leurs propres expériences à propos de leurs choix d’études.
Mais pourquoi parle-t-on du paradoxe de l’abondance de choix. En fait, se retrouver en face d’autant de possibilités différentes devrait nous rendre heureux, car les opportunités sont quasi illimitées. Hélas, ce n’est pas le cas, au contraire, cela nous paralyse parfois plus que cela nous motive et avoir beaucoup trop de choix peut provoquer un important sentiment d’impuissance.
Avoir plus de choix rend l’acte de choisir infiniment plus compliqué. C’est ce que Laurie Santos, professeur de psychologie à Yale explique dans un de ses podcasts. Santos raconte l’expérience du docteure Sheena Iyengar et son équipe qui avaient organisé une vente de confitures dans un supermarché haut de gamme. Ils avaient organisé la première semaine un stand avec des confitures à vendre. 24 choix de confitures différentes y étaient proposés ainsi que la possibilité de toutes les goûter. Grâce à un coupon, les acheteurs pouvaient obtenir une forte réduction.
La semaine suivante, l’équipe de Sheena Iyengar tenait également un stand avec des confitures selon les mêmes conditions, mais avec seulement 6 sortes de confitures différentes.
Après la fermeture du supermarché, le nombre de pots vendus a été calculé. Iyengar a pu observer que le premier stand avec les 24 pots de confitures différents, avait attiré beaucoup de monde, mais que seulement 3% de ces visiteurs avaient acheté un pot de confiture.
En revanche, l’autre stand avait reçu moins de monde, mais 30% des personnes ayant visité ce stand ont acheté de la confiture.
Proposer moins de confiture est donc plus effectif que d’en proposer une grande variété. D’autant plus que les personnes ayant acheté de la confiture au premier stand étaient moins contentes de leur achat, que celles de l’autre stand, car elles avaient l’impression de ne pas avoir fait le bon choix.
Mais pourquoi je raconte cette histoire? En fait, jadis les étudiants avec leur bac en poche, n’avaient que quelques filières parmi lesquelles choisir leurs études. Souvent cela se résumait par les langues, le droit, sciences éco, sciences po, médecine ou ingénieur. J’exagère un peu, mais le choix était plus facile à faire, car il y en avait moins.
Aujourd’hui, les jeunes font face à une telle multitude de choix qu’il est difficile pour eux de choisir, tout comme cela l’était pour les visiteurs du premier stand de confiture. En effet, plus on a de choix, plus il est difficile d’être sûr et plus on a l’impression de rater son choix, un peu comme le FOMO – Fear of Missing Out. Certains étudiants ont aussi peur d’avoir raté leur choix, une fois sur les bancs de l’unif. Pourquoi ils regrettent? Parce que ils regrettent peut-être de ne pas avoir choisi d’autres études. En fait, avoir autant de possibilités nous fait rêver d’un future carrière hypothétique, qui n’est pas toujours très réaliste, car souvent les jeunes ne sont pas assez préparés pour certaines études. Comme le démontre les exemples suivants:
Une de mes anciennes élèves était littéralement paralysée par le fait de faire un choix parmi autant de possiblités. En conséquence, elle ne bougeait pas du tout. Elle n’allait pas aux portes ouvertes, ni au cours ouverts ni se renseignait ailleurs. Pour finir, elle a choisi la voie de son meilleur ami, mais ce choix s’est avéré ne pas lui plaire et l’a rendue malade et dépressive. Elle cherche encore sa mission…
Il y a quelques années, j’ai eu comme cliente une jeune fille qui venait de terminer son bachelor en sociologie. Elle n’était pas contente de son choix initial, mais ne savait pas quoi faire d’autre. Il y avait trop de possibilités et pour finir, elle a choisi par défaut et a continué ses études avec un master en sociologie, mais sans jamais vraiment éprouver du réel intérêt pour la matière.
On peut en conclure deux choses: avoir trop de choix est mauvais pour les gens, surtout pour les personnes qui n’ont pas été préparées pour faire ce choix. En plus, quand on fait un choix parmi des multiples possibilités les gens ne sont souvent pas contents, car ils ont l’impression d’être peut-etre passés à côté de quelque chose de plus intéressant ou plus stimulant.
Que faire dans ce genre de cas ? Il faut d’abord les aider à se renseigner. Les pousser à aller aux portes ouvertes de différentes hautes écoles et universités (même si cela se passe de façon digitale). De visiter le salon SIEP, mais avec un plan en tête. Au SIEP également, il est difficile d’avoir une vue d’ensemble, tellement il y a de possibilités. Donc, planifiez votre visite bien en avant ! Prenez des notes lors de la visite et parler avec les professeurs présents. Attention, toutes ces universités et Hautes Ecoles sont au SIEP pour vous séduire pour que vous alliez vous inscrire à leur université ou Haute Ecole. Garder donc l’esprit critique et ne prenez pas tout ce qu’on vous dit pour de l’argent comptant. Vous pouvez aussi visiter le CIO à Louvain-la-Neuve ou prendre rendez-vous avec une conseillère d’orientation. Ces personnes (dont je fais partie) ont souvent une grande expérience à aider les jeunes à s’orienter vers les études adaptées à la personne.
Mais SURTOUT, il ne faut pas vous faire mettre de la pression, car plus on fait cela, plus on se sent paralysé. Il vaut mieux que le ou la jeune prenne une année off pour travailler, voyager, faire un stage ou faire du bénévolat et/ou apprendre une nouvelle langue que de rester à la maison et devenir dépressif. En outre, c’est une excellente façon d’apprendre à se connaître et de comprendre ce qu’on aime dans la vie.
Plus on commence à s’orienter tôt, mieux c’est. Le mieux c’est de s’y intéresser dès la 3è année d’humanité. Je conseille aussi aux parents de parler de leurs propres métiers et d’amener leurs enfants au bureau ou autre lieu de travail. Et dès que possible, pousser leurs enfants à chercher un job d’étudiant pour découvrir le monde du travail.
Et puis, les études sont organisées d’une telle manière en Belgique, qu’il est encore possible de changer de domaine une fois sur les bancs de l’université ou haute école (jusqu’au 30 septembre ou jusqu’au 15 ou 30 octobre moyennant une lettre de motivation). On peut également passer à un autre domaine après le bac. Par exemple, faire un bac en psychologie et continuer avec un master en sociologie, moyennant quelques crédits en plus.
Pour finir, l’auteur et philosophe existentialiste Albert Camus se posait un matin cette question : Devrais-je me tuer ou prendre une tasse de café? Avec cela il voulait dire que dans la vie tout est question de choix. Mais qu’on n’est pas toujours sûr de nos choix et qu’on ne sait pas toujours ce qu’on veut.
Le sociologue américain Barry Schwartz l’explique bien dans son livre : The Paradox of Choice. Les expériences faites par Schwartz nous montrent que nos souvenirs du passé et nos attentes du futur ont une grande influence sur nos choix et que en conséquence, les résultats ne sont pas toujours parfaits.
Interview avec David, 19 ans et étudiant en 2è année de psychologie aux Pays Bas et Anne-Sophie, 24 ans, photographe – entrepreneur, ayant fait des études de psychologie et de management.