
Parlons Voix !
Le podcast Parlons Voix est un voyage à travers les multiples visages de la voix.
Chaque épisode explore la voix dans tous ses états : outil de communication, miroir de soi, instrument parfois fragile.
Voix cassée, voix retenue, voix projetée - un parcours sonore mêlant récits, témoignages et éclairages scientifiques.
Un jeune acteur à la découverte de sa vocation, une professeure confrontée à une paralysie vocale soudaine, un podcasteur introverti qui ose enfin se faire entendre, un comédien qui donne vie à des voix monstrueuses…
Autant de voix, autant d’histoires, pour mieux comprendre ce qui se joue quand la voix vacille, se transforme… ou se libère.
Embarquez pour cette traversée sensible et sonore, là où chaque voix mérite d’être entendue !
L'équipe de Parlons Voix remercie tout particulièrement Fred Rioux, Adel Rouine, Rachel Bouvet, David Mendes et Sébastien Croteau dont les voix, les idées et la présence ont résonné bien au-delà des mots, éclairant ce voyage sonore de leur humanité vibrante.
Parlons Voix !
E01 - La voix : un visage sonore
Et si la voix en disait plus que les mots ?
Avant même de parler, nous crions, soupirons, rions. La voix est un geste moteur archaïque, contrôlé par des structures cérébrales évolutivement plus anciennes que la parole et le langage, comme le tronc cérébral, le système limbique, ou la substance grise périaqueducale. Produire la voix humaine, c’est coordonner en temps réel près d’une centaine de muscles dédiés à la respiration et à la phonation, avec une précision extrême — un ballet neuromusculaire impliquant le cortex moteur, le cervelet, les ganglions de la base. Ce geste repose notamment sur l’organisation fine du cortex moteur laryngé, dont les connexions vers les régions motrices, émotionnelles et sensorielles permettent à la voix d’être volontaire, affective et contextuelle.
La voix, c’est un visage sonore.
Quand on entend quelqu’un parler — même sans le voir — le cerveau active non seulement ses aires auditives, mais aussi des zones visuelles liées à la reconnaissance des visages, comme le cortex fusiforme. C’est comme si l’on voyait mentalement celui ou celle qui parle ! Cette capacité de la voix à incarner un être, même sans corps visible, est également illustrée dans les œuvres de fiction. Dans le film Her, Samantha, une intelligence artificielle sans corps, est incarnée uniquement par la voix de Scarlett Johansson — une voix suffisante pour créer une identité narrative et affective forte. A l’inverse, le lien voix-visage est aussi exploité dans le cinéma sous la forme du phénomène de “déliaison vocale”, en créant une dissonance radicale qui trouble : dans certains films d’horreur, par exemple L’Exorciste, la voix d’un personnage (enfant) possédé est doublée par un autre acteur (adulte) pour créer une dissonance dérangeante entre le corps et la voix.
Mais la voix est aussi le vecteur d’émotions universelles. Même sans comprendre la langue, nous reconnaissons la joie, la peur ou la tristesse à travers l’intonation et le timbre vocal. Ce phénomène repose sur la prosodie émotionnelle — la mélodie, le rythme, l’intensité de la voix — ainsi que sur des indices de qualité vocale — comme la raucité, le souffle, la tension ou le vibrato. Ces signaux sont traités très rapidement et automatiquement par le cerveau, souvent avant même l’accès au sens des mots.
Écouter une émotion, c’est y réagir corporellement.
Le cortex prémoteur et les systèmes miroirs s’activent quand on perçoit une émotion vocale — comme si le corps s’apprêtait à imiter ou incarner cette voix. Cette résonance motrice constitue l’un des mécanismes clés de notre empathie vocale.
Enfin, lorsque nous ressentons du stress — par exemple en anticipant une prise de parole en public — les circuits de la phonation sont influencés par des régions corticales et limbiques, altérant la voix avant même qu’un mot ne soit prononcé. L’activité de l’amygdale, du cortex cingulaire antérieur et de l’insula s’intensifie, modulant le geste vocal dès la préparation.
La voix ne se limite pas à un moyen de transmettre des mots. Derrière chaque voix entendue, un réseau entier du cerveau s’active: pour la comprendre, pour l’imaginer, pour y répondre. La voix humaine est ainsi un miroir sonore, qui déclenche des réponses motrices, émotionnelles et sociales — elle nous connecte les un·es aux autres bien plus profondément que ne le font les mots seuls. Elle nous révèle, parfois malgré nous, bien avant que le langage ne prenne le relais.
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